Suite de la longue interview d’Andrea Agnelli au quotidien sportif turinois Tuttosport.
Conte reviendra-t-il un jour à la Juve ?
« Aujourd’hui, ce n’est pas prévu ».
Buffon pourra-t-il être président de la Juve ?
« Buffon doit seulement penser au présent et donc au terrain ».
Quelle est la Juve qui vous a donné le plus d’émotions ?
« La première Juventus de Lippi, une Juve qui a transmis beaucoup d’émotions parce qu’elle venait de dix ans sans victoire. Mais la référence a été la Juve de Capello ».
A propos de Capello, que pensez vous de sa revendication des Scudetti de 2005 et 2006 du côté de chez Suning (groupe propriétaire de l’Inter et du club de Jiangsu que Capello entraîne ndlr) ?
« Je pense qu’il est cohérent ».
Concernant votre renvoi devant la justice décidé par le procureur Pecoraro : vous vous attendez à une amende ou une suspension ?
« Nous faisons totalement confiance au travail de la justice. Nous savons que nous avons enfreint le droit de vendre un certain numéro de billets à une même personne mais nous l’avons fait pour des motifs raisonnables. Nous en sommes conscients et je m’attends à une amende. Ensuite, je m’attends aussi à ce que la Lega, la Fédération et les forces de l’ordre trouvent des solutions pour dépasser ce problème parce que si on ne peut disposer, pour des raisons de sécurité, de steward dans les tribunes alors on laisse le terrain libre à la micro ou la macro criminalité. Il serait normal de clarifier ce sujet et cela ne dépend pas de nous ».
Cantone soutient que l’effet médiatique de cette affaire est certainement lié à la Juve ?
« Nous le répétons : il est normal de sanctionner les infractions, mais nous voulons nous entretenir avec des interlocuteurs qualifiés pour rendre le stade aux familles, comme il est normal qu’il le soit ».
Y aura-t-il d’autres top-player comme Higuain à la Juve cette année ?
« Cette année, nous dépasserons les 400 millions de chiffre d’affaire. Nous n’inverserons sûrement pas le sens de la roue. Nous affronterons les sept prochaines années avec la même humilité que nous avons eu durant les sept dernières. Quand la Juve a changé de peau et de dimension, elle a obtenu des résultats. D’ici deux semaines, nous entrerons dans notre nouveau siège, le J Village, doté d’une école, d’un hôtel, de terrains et structures totalement modernes. Nous sommes une Juve complètement différente et d’envergure internationale. Nous devons maintenir la même concentration que nous avions en mai 2010. Jusque là, nous n’avons rien fait. Nos vrais objectifs commencent dès demain matin. Je mise sur l’équipe qui doit répondre présente sur tous les terrains. Sur les dirigeants que nous avons construit ces dernières années menés par Marotta et sur une aire commerciale en grand développement ».
Donc ces sept merveilleuses années ne sont qu’un point de départ ?
« Il faut rappeler que nos adversaires avaient un chiffre d’affaires de 400 millions d’euros quand nous avons lancé notre projet en 2010 et maintenant ils sont à 700 millions. Les principaux coûts sont l’amortissement et la rémunération du personnel. Ce sont des dépenses considérables qui doivent représenter entre 60 et 70% du chiffre d’affaire. 70, c’est déjà trop. Les 30% restants sont destinés aux coûts de la structure. La société ne pourra se projeter dans le futur qu’en évoluant dans un contexte sain et vertueux, en maintenant une grande attention à ces paramètres. C’est pour cela que j’ai parlé d’un championnat de premier et de second plan. Il y a un écart abyssal entre les premiers et les seconds. Une réforme des championnats est indispensable parce qu’il y a trop de différences entre les championnats en Europe, même si les problèmes sont les même. Y a-t-il des équipes en plus dans les différents championnats ? C’est une question qu’il faut se poser. La solidarité a du sens car elle suit un projet sportif. Ce qui n’est pas le cas quand on ne fait que subvenir aux besoins des autres ».
Il y a un problème concernant, par exemple, le parachute qui favorise une équipe qui descend en Serie B ?
« Les Ligues, l’Uefa et les Fédarations doivent réfléchir sur ce que peut être le football des 15 prochaines années en raisonnant au niveau européen. Parce qu’il faut donner des réponses spécifiques à des pays spécifiques. Maintenant, je vais vous poser une question : savez-vous quel est le match qui, au niveau continental, a le plus de valeur économique ? Je vais vous le dire : la rencontre des play-off de Championship en Angleterre. Celui qui est promu en Premier League encaisse tout de suite 150 millions. Un pactole. Il est évident qu’il y a trop de différences dans les différentes réalités du football européen. Nous devons comprendre quel est le vrai modèle pour le football professionnel du futur. Nous avons obtenu un accord pour les droits tv sur la période 2018-2021 et nous sommes sur le point de s’entendre pour 2021-2024. Ce qui va se passer durant les sept prochaines années va redéfinir les logiques du football européen après 2024. Toutes les sociétés ont une planification économique à moyen terme. D’ici 2024, il faudra analyser le football sur une feuille blanche pour trouver une solution entre tous les partis. Je vous donne un exemple : Le Fc Copenhague est un très grand club dans son pays mais il a les mêmes problèmes que d’autres leader. Quel est le modèle qui puisse me permettre de ne pas gagner que dans mon pays ? Comment fait-on pour que Copenhague ait les moyens de gagner la Champions League ? Quel modèle de football voulons-nous après 2024 ? Cela vaut pour tout le monde. Même pour des sociétés italiennes comme Sassuolo. Il faut étudier les mécanismes d’accès. C’est bien de récompenser les équipes championnes et c’est normal de valoriser les deuxièmes, troisièmes et quatrièmes au classement mais le problème d’un modèle uniforme et gérable pour tous se pose toujours » .
Donc pas de superligue européenne ? Ce n’est pas ça le modèle ?
« Dans chaque pays, il y a des logiques différentes mais des problèmes identiques. Tout le monde se demande comment progresser. Nous devons répondre à cette question. Comment faire progresser Copenhague, comment faire progresser le Celtic, comment faire progresser l’Ajax, comment faire progresser Benfica ? Et le modèle ne doit pas favoriser des équipes en particulier mais les championnats dans leur ensemble. Le Président de l’Uefa, Ceferin, s’implique beaucoup sur ce sujet ».
Revenons-en à la Juve : comment battre l’obsession de la Champions ?
« En la gagnant ! Il n’y a pas d’autre moyen. Evidemment, je suis un tifoso déçu pour les 45 dernières minutes mais le tifoso doit prendre conscience du parcours accompli ces dernières années ».