D’abord séduisante puis en quête de certitudes, la Juventus a montré deux visages durant la phase de poules.
Sur les 3-4 premiers matchs, Allegri semblait enfin avoir résolu l’équation entre les caractéristiques des joueurs et le jeu développé : la Juve est efficace et productive. On avait même rarement vu une Juventus aussi dominatrice dans une phase de groupe. A Valence, bien qu’elle soit réduite à 10, elle gère son match d’une main de fer. La détermination de certains joueurs comme Bernardeschi fait même oublier l’infériorité numérique. Contre les Young Boys, c’est un récital : la Vieille Dame s’amuse et Dybala se fait plaisir. Enfin, à Manchester, bien qu’elle ne marque qu’un but, la Juve semble intouchable. Sa supériorité est manifeste. Des débuts convaincants et qui enchantent… jusqu’au coup-franc de Mata (ou le changement Barzagli-De Sciglio). Qu’est-il alors arrivé au projet tactique qui avait provoqué tant d’euphorie ? Comment le parcours destiné à nous consacrer comme LE favori a-t-il pu s’interrompre ?
En arrière toute !
Après ces deux buts encaissés contre Manchester United, la Juve a changé son fusil d’épaules pour retrouver ses certitudes défensives. Finie la recherche de la possession et le pressing haut, on voit une Vieille Dame déjà moins audacieuse contre Valence à l’Allianz Stadium. Et en championnat aussi, elle se montre cynique et solide contre Milan et la Fiorentina et même opportuniste contre l’Inter après le poteau de Gagliardini et le but à l’arrache de Mandzukic. C’est un peu comme si le but de Fellaini avait poussé l’équipe à se retrancher sur elle-même : cinq matchs de suite sans prendre de but, Chiellini on fire, défense à sept sur un Icardi esseulé. Et Mandzukic, avec ses but au second poteau contre Valence et l’Inter ainsi que ses replis défensifs frénétiques, redevient alors le symbole d’une Juve non pas séduisante mais gagnante. Tous ces efforts requièrent beaucoup d’attention, de concentration au point de complètement lâcher prise sur le synthétique de Berne.
La Juve se cherche encore
Faut-il être surpris ? Non. Allegri fait toujours comme ça. Il expérimente, propose, élabore des stratégies mais il veut avant tout gagner, coûte que coûte. Et c’est seulement après cela qu’on peut, éventuellement, travailler sur l’esthétique. Cela s’est toujours déroulé de cette façon quand nous avons vite mis le Scudetto à l’abri, nous atteignons deux fois la finale de Ligue des Champions avec audace et en séduisant. Et au contraire, la Juve est passée à la trappe lorsque le championnat était plus disputé (le départ plombé de 2015 et le duel jusqu’au bout contre le Napoli la saison passée) : ces deux années-là, nous avons été éliminés sans être brillants et malgré des demi-miracles.
Faut-il avoir peur ? Non. C’est la raison pour laquelle nous gagnons autant depuis des années : nous sommes capables d’enchaîner les victoires même sans briller, nous coulons nos adversaires pile au moment où ils pensaient avoir colmaté l’écart qui nous sépare. Forte de ses huit points d’avance, la Juventus a encore deux mois pour panser ses blessures, retrouver sa forme physique et travailler son jeu. Pour le moment, nous sommes encore un modèle hybride : plus prometteur que d’habitude mais qui peut vite retomber dans ses vieilles habitudes défensives.