C’est samedi dernier, à l’occasion du match contre le Chievo, que Leonardo Bonucci a affirmé encore un peu plus son statut de pilier au sein de la Juventus. Ce dernier a en effet été récompensé par Agnelli pour avoir dépassé les 300 présences avec le club turinois. Retour sur la naissance d’un phénomène, du jeune espoir de Bari au défenseur indélogeable de la Vieille Dame.
A 22 ans, Leonardo Bonucci, est un jeune espoir de la défense italienne. Le duo qu’il forme à Bari avec son acolyte Andrea Ranocchia impressionne dès le premier match; titularisés contre l’Inter tenante du titre, les deux jeunes prennent leurs responsabilités et font leurs preuves, arrachant le nul à Milan. Beaucoup de grands clubs guettent à ce moment ce qui sera en milieu de saison la deuxième meilleure défense de serie A. S’installe alors une bataille entre l’Inter, club de formation de Bonucci, et la Juventus pour le recrutement des deux prodiges.
Alors que Ranocchia se blesse au milieu de la saison, Bonucci lui, connaît une progression fulgurante. Il fait tout d’abord partie des 23 joueurs appelés en équipe nationale par Marcello Lippi pour participer au mondial 2010. S’il n’aura pas vraiment l’occasion d’y faire ses preuves, cela n’empêche pas le nouveau président Andrea Agnelli et son staff composé des désormais célèbres Marotta et Paratici de le ramener à Turin cette même année pour une somme avoisinant les 15,5 millions d’euros. Avec quel objectif? Redonner des couleurs à la Vieille Dame, qui a échoué lors de la saison passée à la septième place du classement. Et remplacer, du moins numériquement, Fabio Cannavaro parti pour Dubaï. Grosse pression. «Quand je suis arrivé à la Juventus, j’ai remarqué l’envie qu’il y avait de commencer une nouvelle ère Nous voulons oublier le passé et bien commencer ce nouveau cycle» déclare le néo-juventino. Une nouvelle ère est effectivement sur le point de commencer, et la prophétie enchante les supporters, qui aimeraient à nouveau voir la Vieille Dame régner sur l’Italie. Peut-être grâce à son nouveau défenseur? «Je me sens juventino, et je suis prêt à commencer une nouvelle aventure ici. C’est l‘accomplissement d’un rêve, et le point de départ pour devenir un grand joueur avec la Juventus», ajoutera-t-il.
L’entraîneur du club turinois Luigi Delneri lui fait tout de suite confiance: le jeune défenseur est le joueur le plus utilisé cette saison en championnat avec 34 apparitions. Bonucci est chargé à bloc: «Je veux encore m’améliorer, et gagner le plus possible. Nous ne devons pas bercer les supporters d’illusions, mais nous ferons tout pour leur donner de grandes satisfactions en nous battant à chaque match». Si l’envie est là, la saison se complique toutefois pour lui: beaucoup d’erreurs, dues à des baisses de vigilance ou bien à des prises de risques mal maîtrisées, sont à noter. Les supporters sont sceptiques, et à la fin de la saison, la Juve échoue de nouveau à la 7ème place du classement.
Heureusement pour lui, et pour le peuple noir et blanc, Bonucci n’est pas le genre de type à se décourager. Son mental d’acier lui permet de continuer son aventure à la Juventus, et de se donner du temps pour mieux progresser. Cette partie importante de sa personnalité le caractérise sur le terrain, c’est un vrai guerrier, comme le souligne Giorgio Perinetti, ancien directeur sportif de Bari: «Bonucci a une énorme force de caractère qui comble certaines des carences qu’il peut avoir. Il parvient à corriger ses défauts avec une grande volonté et de l’entraînement.» Pour couronner le tout, on apprend alors que le joueur turinois a fait appel aux services d’un coach mental, Alberto Ferrarini. Celui-ci choisit une méthode plutôt radicale pour stimuler un jeune homme en perte de confiance:«Les soldats, il y a cent ans, mangeaient de l’ail pour rester forts, sains et lucides durant la bataille. Leo est un soldat, je lui donne donc des bonbons à l’ail avant chaque match», confie-t-il. Le défenseur juventino apprend à faire fi des critiques et de la pression qui pèse sur lui, et se montre très reconnaissant envers le monsieur: «Quand j’étais à Trévise [prêté par l’Inter, ndlr], j’avais perdu confiance en moi, et ma carrière était en danger. Avec Alberto, j’ai retrouvé de la sérénité. Nous avons creusé certaines situations qui me pesaient depuis longtemps et me créaient des problèmes. Cela m’a également aidé sur le plan physique: je vais bien physiquement et mentalement». Un vrai soldat, Bonucci, qui ne manque pas de faire preuve de combativité à chaque minute qu’il passe sur le terrain «On a donné un nom au soldat que je suis sur le terrain: Leonardobi. Je l‘ai écris sur mes chaussures, pour me rappeler que chaque match est une bataille».
Six ans après cette première saison, l’espoir a confirmé. Indispensable au sein de la défense turinoise avec ses compères Barzagli et Chiellini, qui martyrisent les attaques de Série A et donnent du fil à retordre aux grosses équipes européennes, il l’est également en équipe nationale avec ses 69 sélections. C’est grâce notamment à son excellente capacité de relance que l’on sait que le bonhomme était autrefois milieu de terrain. Remercions son ancien entraîneur chez les jeunes de l’Inter, Carlo Perrone, qui l’a replacé en défense, car c’est avec cette précieuse qualité qu’il complète parfaitement les deux monstres qui l’entourent. En effet, étant des défenseurs plus classiques, performants en un contre un, qui cherchent avant tout à stopper l’attaque, ils permettent à Bonucci d’exploiter au maximum sa technique balle au pied, de distribuer des passes de génie et de participer directement à la construction du jeu. Oubliées les erreurs de jeunesse et les manques de concentration, maintenant, le numéro 19 est un pilier de celle qui a été sacrée meilleure défense de Serie A 6 années de suite.
Avec le temps, le défenseur italien a peu à peu acquis une constance qui fait de lui l’un des joueurs les plus utilisés ces dernières saisons, et non sans raison. Infatigable Bonucci, qui, mis à part un claquage cette saison et une petite déchirure l’an dernier ne s’est jamais blessé en 7 années de Juve. Il est, pour les supporters, l’un des visages du renouveau de la Juventus, qui contribue maintenant à transmettre l’ identité de celle-ci aux plus jeunes. Bonucci est un homme qui donne beaucoup sur le terrain, mais aussi en dehors, comme le prouve son attitude le 9 février 2013 où, suspendu, il assiste au match Juventus-Fiorentina dans la Curva Scirea parmi les supporters.
A l’heure où il a atteint un pic de maturité, de constance et de régularité qui en font l’un des meilleurs défenseurs du monde, il n’est pas étonnant que les rumeurs de transfert se succèdent. Longtemps courtisé par la Premier League, avec Guardiola qui déclare qu’il est l’un de ses joueurs préféré, et Conte qui aimerait transférer l’un des meilleurs éléments de sa période juventina dans sa nouvelle équipe de Chelsea, Bonucci a l’embarras du choix. Avec 5 titres de champions d’Italie, 3 Supercoupes et 2 coupes d’Italie, le défenseur de bientôt 30 ans a un palmarès conséquent; il ne lui manque qu’un titre européen. Mais heureusement pour les supporters de la Juventus, il ne manifeste pas encore l’envie de changer d’air: «Dire non au Barça et à Manchester City n’a pas été chose facile. Comment ça aurait pu l’être, quand tu sais que le meilleur entraîneur du monde te veut? Mais la Juventus est ma maison, et je suis heureux d’y être resté. Mon rêve,»rappelle-t-il «c’était de gagner avec ce maillot et aujourd’hui je suis là, prêt à m’améliorer et à me remettre en question pour faire en sorte que cette équipe entre dans la légende.» Des paroles qui rassurent.
Si la Juventus réussisait à conquérir un sixième titre d’affilée et une Ligue des Champions qui lui échappe depuis 21 ans, elle entrerait effectivement dans la légende. Ce qui est sûr, cependant, c’est que Leo, avec ses 309 présences, y est déjà. Il ne nous reste plus qu’à le remercier et à espérer qu’il reste encore de nombreuses années bianconero.
« 300, ce n’est pas le film que vous connaissez. 300 c’est mon film en noir et blanc qui a débuté en août 2010. 300, c’est le nombre de fois où, portant ce glorieux maillot, je me suis senti responsable de sa défense envers et contre tout. Quand tu entres sur le terrain avec ce maillot, tu emmènes aussi des millions de supporters qui comme toi ne veulent qu’une chose: GAGNER. 300 fois merci à ceux qui ont cru en moi, à ceux qui ont partagé ma joie, à ceux qui ont gagné avec moi. Et l’histoire continue… »
Super article, pleins de passions dans ces propos ! J’ai appris des choses sur Bonucci. La juve a de la chance de l’avoir, il l’a porte vraiment dans son coeur et ça c’est beau!