A la veille de la demi-finale aller de Ligue des champions contre Monaco, le capitaine bianconero Gigi Buffon s’est exprimé en conférence de presse.
Gigi n’est pas le genre d’homme à sous-estimer la concurrence, et il le prouve à nouveau, mettant sur un pied d’égalité les deux équipes: «Je crois que si la Juve et Monaco en sont arrivées à jouer pour une place en finale de la Ligue des champions, c’est parce qu’elles l’ont mérité et qu’elles ont des valeurs qui les ont emmenées jusqu’ici. C’est pourquoi je crois qu’au delà de ce que pouvaient être les objectifs de début de saison, ce sera un match équilibré entre deux grandes équipes qui grâce au mérite, à l’assurance et à une certaine personnalité sont arrivées en demi-finale.»
Cependant la Juve a un petit avantage: «Selon moi, demain, notre expérience nous porte à savoir que la qualification se joue sur 180 minutes, et ça peut jouer en notre faveur.»
Il donne toutefois un point en faveur de Monaco en ajoutant: « Je pense qu’eux, étant une jeune équipe qui dégage une grande vitalité, sont enthousiastes et possèdent cette saine insouciance que la jeunesse te donne. Parce que moi aussi j’ai été un jeune footballeur et je sais très bien ce que ça signifie de se retrouver à jouer certains matchs et de se sentir imbattable et indestructible au-delà de ce qu’il y a sur le papier et dans les médias. Et je pense que ces émotions et ces sensations, ils sont en train de les éprouver.»
Il ajoute également: «Et pour nous, le danger à part ça, c’est qu’on joue contre une équipe qui n’est pas en demi-finale par hasard. C’est une équipe qui a d’abord sorti Tottenham et Leverkusen, qui sont de grandes équipes, puis City et Dortmund de façon nette et sans équivoque. Cette équipe a une grande valeur en plus de sa vitalité et de son enthousiasme.»
La force principale de Monaco, c’est bien sûr l’attaque: «Monaco est une équipe audacieuse, qui aime attaquer et qui le fait très bien. L’entraîneur est bon, il enseigne un football offensif et courageux, et ça, tu peux réussir à le faire quand tu as des joueurs qui ont des qualités aussi bien techniques que physiques hors du commun.»
Mbappé ne sera pas le seul homme à surveiller: « Monaco a marqué énormément de buts cette année, mais il n’y a pas que Mbappé même s’il est la star de l’équipe et le joueur qui mérite les honneurs qu’il a eus de la presse ces six derniers mois. Il y a aussi Falcao et d’autres garçons qui sont dangereux. J’ai du respect pour Monaco parce que je sais que quoi qu’il se passe demain, la qualification resterait ouverte jusqu’au retour parce qu’ils sont forts de cette attitude qui les rend imprévisibles.»
Attaquer ainsi face à la meilleure défense d’Europe, est-ce que ça sera la stratégie adoptée par Monaco ? Pour Buffon, il est clair que oui : «Je ne pense pas que Monaco se dénaturera, ils sont arrivés avec des certitudes et des caractéristiques bien précises et j’imagine qu’ils ont envie d’appuyer ce genre de philosophie, qui est gagnante parce qu’elle les aura emmenés au moins jusqu’en demi-finale de Ligue des champions et aura fait en sorte que les experts du foot les remarquent. Monaco, qui il y a deux ans était arrivé en quarts, jouait un football un peu réservé, alors que celui-ci au contraire est brillant. Dès le moment où tu réussis à transmettre cette mentalité à une équipe, il me semble impossible de revenir en arrière juste parce que tu es en demi-finale ou que tu rencontres la Juventus»
Et il y a deux ans, dans quel état était arrivée la Juve en finale? «Peut-être que nous étions tendus parce que premièrement, il est clair que pour affronter une équipe composée champions comme celle du Barça tu ne peux pas arriver frivole, détendu et joyeux, parce qu’autrement tu leur donnerais un avantage énorme. Et deuxièmement, je pense que l’approche de chaque match est personnelle. Je crois que si d’une part nous pouvions être tranquilles il y a deux ans parce que nous avions atteint quelque chose d’inespéré, cette année nous pourrions être encore plus tranquilles parce que si nous arrivions à grimper cette petite marche, ce serait presque le résultat logique d’un parcours qu’on a commencé il y a longtemps et qui nous a porté à ce niveau. Et je pense que c’est vraiment important d’avoir ce genre d’attitude pour certains matchs.»
Gigi comptera beaucoup sur les tifosi bianconeri, pour qui le déplacement ne sera pas trop compliqué: «J’attends que le stade soit plein, en partie parce que vu sa capacité, il est normal que lors d’un tel match toutes les places soient prises. Je m’attends aussi à beaucoup d’enthousiasme, également de la part des supporters locaux parce qu’à la différence d’il y a deux ans, Monaco s’élève aussi en championnat. En ce qui concerne les supporters italiens, je pense que le soutien ne nous a jamais manqué, et ne manquerait pas même si nous jouions à Tokyo. Raison de plus pour imaginer que nos supporters se feront entendre.»
Tout le monde attend Higuain au tournant, lui qui a été démoli par la presse après le match au Camp Nou car il n’a, selon certains, pas joué son rôle puisqu’il n’a pas marqué. Buffon le défend: «En ce qui concerne Higuain, même s’il n’a pas marqué durant les deux matchs contre Barcelone, il a permis qu’on n’encaisse pas de but. Quand cela arrive, le mérite va à tout le monde, pas seulement au secteur défensif. Et deuxièmement, il s’est toujours trouvé dans la bonne position pour faire en sorte que notre jeu se déroule de manière fluide, et a toujours délivré de bonnes passes qui ont permis de gagner la rencontre. C’est sûr que tout le monde attend toujours son but, mais ce que j’espère c’est qu’il ne perde pas l’attitude qui le caractérise à la Juve, parce qu’avec celle-ci je suis sûr que nous pourrons aller encore plus loin. Quel que soit le joueur qui marque, ça ira très bien.»
Si Lippi préférerait rencontrer l’Atletico en finale, Buffon en revanche n’a pas de préférence: «Je ne supporte personne parce que quel que soit le gagnant, il nous donnera du fil à retordre. J’aime la compacité et la mentalité de l’Atletico, mais le Real en Ligue des champions a quelque chose, il est né sous une bonne étoile parce qu’il arrive toujours, quelle que soit la manière, à renverser les pronostics et à gagner les matchs qui semblent impensables.»
Gigi s’attaque ensuite à son propre ressenti, lui qui arrive à la fin de sa carrière : «Falcao a dit que vu son âge, la demi-finale est une occasion unique; et bien c’est très beau. Parce que c’est un homme qui se plonge dans la réalité étant donné que la majorité du temps, c’est comme ça pour 90% des footballeurs. Mais en notre for intérieur nous gardons toujours l’espoir que le futur nous réserve une autre chance, ou carrément la possibilité de pouvoir fêter la consécration d’un but qui pouvait semblait inespéré. C’est le mode de pensée d’un athlète. Le compétiteur doit extérioriser des pensées qui ne doivent pas sembler prétentieuses, mais il doit avoir en lui la conviction de pouvoir reconsidérer jusqu’à sa carte d’identité.»
Justement, Buffon avait dit qu’il s’arrêterait de jouer s’il ne prenait aucun but contre le Barça. Il explique: «Ce que j’ai dit avant le match contre le Barça, c’est un moyen comme un autre de rester jeune, de se stimuler soi-même mais il est aussi vrai que certaines fois… maintenant non, parce que j’ai un certain âge, mais quand j’étais jeune il m’arrivait de faire tirer les attaquants à l’entrée de la surface et de dire: » si tu marques, je vais au siège et je déchire le contrat ». Parce que les gardiens sont aussi ceux qui doivent faire bouger les choses s’il y a un peu d’engourdissement. J’ai dit n’importe quoi, et quand c’est le cas on assume et on va de l’avant.»
Partir sur une victoire en Ligue des champions n’est pas le souhait de Gigi : «Je sais que ça peut être difficile à comprendre, mais pour moi jouer une demi-finale de Ligue des champions ou commencer chaque année cette compétition, c’est enthousiasmant. Ça me rend heureux et me rajeunit, parce que je sais que je pourrais exprimer pleinement ce que je suis, et c’est pour ça que je suis né. L’émotion que je vis en jouant ces matchs est énorme, que je gagne ou non. Si on devait gagner, ça ne changerait rien au fait que j’ai un contrat jusqu’en 2018 et que j’ai encore des objectifs à atteindre jusqu’ici.»