Deux ans après avoir révélé son nouveau logo, la Juventus continue de développer son nouvel univers de marque. 

L’avènement des réseaux sociaux a marqué l’entrée dans une nouvelle ère : celle de la communication. Alors que notre monde est toujours plus connecté, le storytelling est progressivement devenu le plus grand terrain de bataille des entreprises qui veulent gagner des parts de marché. Bâti sur des accords commerciaux juteux, le monde du football n’y fait pas exception. Se raconter ne peut plus être vu comme du bonus ou un luxe mais bien comme une véritable priorité.

Gagner n’est plus la seule chose qui compte

Quand un sport est autant suivi que le football, il est inévitable qu’un certain nombre d’idées pré-conçues gravitent autour. Parmi celles-ci, on trouve l’habituel argument du ‘le marketing ce sont les grands joueurs et les trophées qui te le font’. Une affirmation aussi vraie qu’incomplète. Manchester United n’a pas gagné plus que la Juve et assurément moins que le Real. Bien qu’ils naviguent dans la médiocrité depuis plusieurs années, les Red Devils restent une des marques les plus solides au monde. En 2013, ils avaient huit partenaires commerciaux. Aujourd’hui, on en compte 80. L’excellent travail réalisé dans les bureaux affaiblit le besoin de résultats sportifs. Outre-Atlantique, les Los Angeles Lakers et les New York Knicks sont les franchises NBA les plus riches du moment et ce malgré une absence de succès récents. Les Knicks portent même l’image d’une équipe perdante. On est là devant des cas typiques montrant que gagner n’est plus la seule chose qui compte.

Depuis un moment, les clubs de l’élite européenne ont fait le choix de se raconter, chacun à sa propre manière. Le plus important n’est pas de savoir qui le fait le mieux, il suffit juste de le faire. Le Real Madrid est le pionnier du genre, avec une histoire qui se base sur le rêve : c’est la sélection des meilleurs joueurs du monde, le club dans lequel tous les enfants rêvent de jouer un jour. Ce fut le premier club à comprendre que les joueurs pouvaient être plus que des sportifs et devenir des marques à part entière. Et des ambassadeurs du club par la même occasion. Le terme ‘Galactique’ résume la vision madrilène. Même si le Real a peu gagné sous cette ère, personne n’en a tenu compte. La magie qui s’était créée autour d’eux dépassait les trophées, c’était de l’admiration pure et dure. Le FC Barcelone, avec les achats de Neymar, Suarez, Dembélé et Coutinho ces dernières années, suit la même stratégie, s’éloignant en même temps de la tradition romantique et philosophique de la Masia. Si le projet est très coûteux économiquement et pas si simple, la réussite comporte en revanche des résultats exceptionnels. Les, respectivement, 66 et 63 millions d’abonnés sur Instagram donnent une vague idée de leur taux de pénétration dans les marchés des quatre coins du monde.

Le projet ‘Black and White and More’

Compte tenu de son retard sur les Espagnols et ne pouvant compter sur un produit attractif comme la Premier League, la Juve a opté pour un choix contre tendance, mais absolument fascinant.  Il y a deux ans, le projet ‘Black and White and More’ initiait la plus grande opération de rebranding jamais connue par un club de football et dont la création du nouveau logo constituait la pierre angulaire.

A ce moment, la Juventus a décidé de ne plus être qu’un club de foot : « Black and White and More est un plan d’ampleur majeure destiné à concrétiser notre philosophie, la recherche de l’excellence sans compromis, à travers des initiatives variées et des expériences innovantes dont le football sera toujours l’origine mais jamais la limite. Black and White and More déclinera le savoir-être de la Juventus – les principes et les valeurs du club – dans des expériences diverses et uniques adressées à la fois aux passionnés bianconeri du monde entier mais aussi aux personnes moins proches du football. Nous voulons que le public ne voit pas seulement la prestation d’une équipe mais qu’il puisse aussi vivre l’esprit le plus profond du club ».

Comme chaque multinationale, on ne reconnait plus la Juventus pour ce qu’elle fait – jouer au football – mais pour ce qu’elle veut être. La Juventus est maintenant un concept, une idée, un ensemble de valeurs destiné à être décliné de multiples façons selon le public visé. Et voilà alors le nouveau logo, dénué de toute référence au football, unique en son genre et facilement reproductible. A tel point que même le fils de Messi s’amuse à le dessiner.

Regarde Papa, j’ai dessiné le logo de l’équipe du meilleur joueur du monde

De multiples opérations sans rapport avec le sport

Comme une maison, chaque histoire ne peut reposer sur un seul pilier. Deux mois à peine après avoir révélé son nouveau logo, la Juve participait pour la première fois à la Design Week milanaise, un des événements les plus importants au monde, réunissant les personnalités les plus créatives. Le public est jeune, cultivé, déconnecté du monde du sport et surtout, international. Et qu’a fait la Juve ? Elle a parlé d’elle-même, à travers le design et avec un partenaire exceptionnel : Wallpaper*, un des magazines les plus respectés du domaine. Elle a présenté deux ballons en marbre : un noir et un blanc qui sont maintenant fièrement exposés au siège du club, comme s’il s’agissait d’une œuvre d’art.

Pendant la tournée américaine, un événement était organisé à la Boiler Room de New York, lieu de concert diffusé en streaming, où les DJ portaient des casquettes bianconere et le logo de la société apparaissait partout. Ce public ne connaissait pas la Juventus mais fut content de la découvrir, la trouvant même ‘cool’.

Dernière idée : des lieux de vie estampillés Juventus

Un an plus tard, retour à Milan où la Juventus révèle son nouveau projet sobrement appelé ‘Undici’. Un projet ambitieux et facilement exportable, mélange entre concept store à la mode et Starbucks, lieu de vie par excellence. Ici, les personnes pourront passer du temps ensemble, travailler, consommer des produits culinaires italiens dans un environnement aux couleurs de la Juventus. Un lieu d’expérience destiné à positionner la marque Juve toujours plus haute dans la tête du consommateur. Bien entendu, un corner shop où acheter maillots et goodies est intégré. Le développement du projet a été confié à Segafredo Zanetti, référence dans le domaine, et prévoit une vingtaine d’ouvertures sur les trois prochaines années, en Asie et aux Etats-Unis.

On remarque que ces projets ne naissent pas pour les tifosi et ne s’adresseront probablement jamais à eux. Mais ils bénéficieront sûrement des résultats économiques de cette politique. Car pour chaque casquette acheté par un inculte new yorkais du football, ce sont quelques euros de plus pour l’achat du prochain CR7 qui entrent dans les caisses de la Vieille Dame.

Bienvenue dans la Juve du futur, celle du ‘Think global, act local’.

Sur la base de l’article de @sersim sur Juventibus : https://www.juventibus.com/juve-club-marchio-mondiale/

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