Qui dit numéro 10, dit responsabilité, et on peut dire sans se tromper qu’à la Juve, c’est encore plus le cas. Passer derrière des légendes comme Platini, Baggio ou Del Piero n’est jamais simple. Il n’y a qu’à voir comment Pogba a eu du mal à assumer son nouveau statut à l’époque, en utilisant des stratagèmes mentaux en rajoutant un « +5 » sur le maillot pour s’enlever ce lourd héritage. Aujourd’hui, c’est Dybala qui porte ce nombre symbolique. Il réussit avec assez de succès son parcours pour l’instant, mais une chose est sûre : on ne lui fait pas de cadeaux pour autant. Que ce soit les critiques par certains supporters pendant les périodes de disette ou les passages sur le banc par Allegri, rien n’est facile pour l’Argentin et d’autant plus cette année. Nous allons analyser le début de saison du meneur de jeu afin de déterminer si ce dernier à un nouveau rôle au sein de cette équipe auquel il doit s’adapter.

 

Nouveau positionnement, nouvel effectif

On ne va rien vous apprendre, le mercato estival mené par la Vieille Dame est marqué par des arrivées telles que Cancelo, Emre Can ou encore Ronaldo. En l’espace de seulement quelques semaines, ils sont devenus des joueurs importants de l’effectif. Au départ, Allegri a opté pour un 4-2-3-1 en plaçant l’Argentin en meneur de jeu. Lors du premier match de cette saison, nous avons pu constater que les joueurs ne se connaissaient pas bien et que la connexion CR7-Dybala n’était pas évidente. De plus, la Joya ne semblait pas être en condition physique. Sur les premiers matchs, le Mister voit bien que son équipe manque d’équilibre défensif et décide de passer dans un 4-3-3 pour apporter plus de poids au milieu. Lorsque l’on sait que Dybala a un profil de numéro 10 et que Bernadeschi est un ailier faisant un début de saison sensationnel, nous avons un peu peur qu’il soit mis sur le banc.

C’est ce qu’il s’est passé ! Comme dit précédemment, Bernadeschi a été récompensé de ses performances par le coach en l’alignant titulaire à plusieurs reprises. Dybala mis sur la touche, une formation sans meneur de jeu, on se dit qu’il mettra du temps à retrouver sa place. Cependant, Allegri décide de remettre Dybala titulaire et affirme que sa condition physique ne pose plus de problème. Sauf que l’Argentin est placé côté droit du terrain, c’est-à-dire que le coach prend la décision de ne pas changer de système pour l’intégrer. Depuis que Dybala est revenu en tant que titulaire lors du match contre Sassuolo, le 4-3-3, le 3-5-2 et le 3-4-3 sont les systèmes utilisés. À chaque fois, Dybala a joué côté droit sauf lors de la rencontre face à Bologne où il était placé derrière l’attaquant. Conclusion ? Nous avons retrouvé la Joya, celle qui distille le jeu, qui dribble, qui frappe et qui brille par son talent. Mais alors, pourquoi autant de temps d’adaptation ?

Passes de Dybala sur Cancelo avec le portugais piston gauche
Passes de Dybala sur Cancelo avec Cancelo arrière droit

Voici deux matchs où Cancelo joue arrière gauche contre Bologne et arrière droit contre Sassuolo. Dans les 2 cas, Dybala a fait le plus de passes au portugais.

 

 

 

 

Premièrement, ses coéquipiers. On remercie du fond du cœur nos anciens joueurs comme Lichtsteiner et Higuain (cœur avec les doigts), mais aujourd’hui ce sont les Portugais Cancelo et Ronaldo qui les remplacent. Malgré toute la bonne volonté du Suisse, Cancelo est un joueur beaucoup plus technique et rapide, mais surtout, qui participe plus au jeu. Le latéral Portugais pourrait presque jouer au milieu tellement il est habile techniquement. Ce n’est pas pour rien que Dybala lui fait le plus souvent la passe puisqu’il n’hésite pas à apporter offensivement avec ses montées fréquentes. Pour Higuain et Ronaldo, quand Pipita est un joueur qui participe beaucoup, n’hésite pas à redescendre et jouer dos au but en remise, le Portugais lui, est un provocateur, un dribbleur, avec un impact physique sur le jeu. Combien de fois la saison passée, nous nous plaignions de la pauvreté créative de l’équipe où nous avions l’impression de demander à la « HD » de faire un exploit ? Aujourd’hui et depuis le début de saison, nous assistons à une fluidité du jeu sur toutes les zones du terrain. Pour en arriver là, il fallait intégrer les recrues aux joueurs déjà en place, et c’est tout à fait normal que Dybala, étant un joueur central de l’équipe, ait dû s’adapter.

Deuxièmement, son positionnement. Comme évoqué plus haut, Dybala joue à droite la plupart du temps. Lors de l’exercice précédent, Dybala était en position de meneur central et avait tous les joueurs autour de lui. Cette année, l’Argentin est placé côté droit et n’est pas forcément au contact de tous ses coéquipiers. Cela se remarque sur les stats ci-dessus où Cancelo est le joueur le plus recherché et quand c’est Cuadrado qui remplace le portugais, le Colombien est également le joueur qui est à la réception des ballons de la part de la Joya. Pour autant, est-ce que Dybala a changé sa manière de jouer ?

 

Positionnement réel et gestion

Jouer en tant qu’ailier demande des qualités de percussion, que l’Argentin possède, mais ne pas le placer au cœur du jeu aurait gâché les qualités du joueur. S’il joue côté droit sur le papier, il n’en reste pas moins un meneur de jeu dans son style et son attitude. Avez-vous vu un joueur diffèrent par rapport à la saison dernière ? Comme on peut voir sur les images ci-dessous, la position moyenne de Dybala est au même endroit. On peut également observer que les lignes de passes ont toujours pour but d’écarter le jeu, de temporiser s’il n’y a pas de solutions ou de progresser dans la moitié de terrain adverse.

Passes de Dybala lors du match de la saison dernière contre Sassuolo où il s’offre un triplé
Passes de Dybala lors du match contre Naples où l’argentin était surtout présent dans la construction

Que cela soit l’année dernière ou cette année, il reste un electron libre dans l’effectif. On peut constater sur notre exemple qu’il n’a pas de positionnement fixe et que le schéma ne change rien à son influence.

 

 

 

 

De plus, l’arrivée de Cancelo permet à Dybala de « délaisser » le côté pour que le Portugais prenne l’espace. On compare souvent Dybala à Messi pour sa gestuelle et sa manière de jouer, mais on peut également trouver un rapprochement entre Cancelo et Dani Alves, sur leurs qualités techniques et leurs comportements de « meneurs excentrés ». En 2015, lorsque le FC Barcelone fait une saison parfaite avec un triplé à la clé, Alves était le joueur le plus sollicité par Messi. Le schéma de jeu était un 4-3-3 dans lequel Messi était positionné théoriquement à droite. Sauf que, les montées régulières du Brésilien lui ont permis de se positionner dans l’axe et d’être un électron libre. Alves est entre temps, passé par chez nous une saison, où il aura pleinement exploité ses qualités techniques, jusqu’à jouer milieu droit. La perte du brésilien a été importante sur le jeu, mais aujourd’hui Cancelo peut le remplacer, pour au final former avec Dybala un duo et reproduire la connexion Messi – Alves.

Positionnement de Dybala toujours dans la même zone que cela soit en 4-2-3-1 l’année dernière, en 4-3-3 ou 3-4-3 cette année

Allegri croit beaucoup en son jeune prodige argentin et dit vouloir le protéger. Lors de ce début de saison, beaucoup ne comprenaient pas pourquoi le numéro 10 était mis sur le banc puis, lorsqu’il jouait, alors que le joueur n’était pas prêt physiquement, les critiques tombaient sur sa titularisation. Cependant, il ne faut pas avoir la mémoire courte, mais bien se souvenir de ce qu’il s’est passé la saison dernière. Après un début de saison canon avec 10 buts en 6 matchs, la Joya avait tendance à surjouer et vouloir marquer plutôt que de faire jouer ses coéquipiers. Le coach avait décidé de le mettre sur le banc pour lui faire passer un message. Par la suite, les blessures l’ont écartées des terrains jusqu’en février. Puis à partir de ce moment, l’Argentin nous a sauvé de plusieurs situations qui se sont révélées être décisives par la suite comme le but à la dernière seconde contre la Lazio, le but qualificatif en Ligue des Champions contre Tottenham ou encore sa rentrée en jeu décisive contre l’Inter pour inverser l’impossible.

Ce qu’il faut retenir de cette situation, c’est qu’Allegri a compris comment gérer son joyau, quitte à se mettre à dos son joueur. Mais pas seulement, il a aussi réalisé que Dybala n’est pas un joueur autour duquel on construit une équipe, c’est un joueur qui peut exprimer son talent, peu importe le système, puisqu’il reviendra de lui-même au centre du jeu.

On ne divise pas jeu et résultats ! Lotta et non mollare mai...

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