Daniele Rugani a fêté ses 24 ans le 29 juillet dernier. Fort de 3 saisons avec la Juventus, il a largement dépassé la période d’essai et l’heure du bilan est arrivée. 

Recruté par la Vieille Dame en 2012, Daniele Rugani marque tout de suite les esprits dans la primavera de Baroni. Il ne faut pas longtemps avant qu’il soit renvoyé vers son club formateur où, sous les ordres de Maurizio Sarri, il enchaîne une promotion en Serie A et un maintien. Au moment de revenir à Turin en 2015, il est unanimement considéré comme le meilleur espoir italien en défense. Sa maturité et la précision de ses interventions impressionnent : sa saison entière sans prendre de carton jaune (en 3 420 minutes jouées) ne passe pas inaperçue.

Saison 1 : ‘Max m’as-tu vu ?’

Malgré tout cela, Daniele Rugani peine à gagner la confiance de Massimilano Allegri et ses débuts à la Juventus sont laborieux. Dans l’ombre de la BBC (Barzagli, Bonucci, Chiellini) mais aussi d’un joueur d’expérience comme Martin Caceres, il doit attendre décembre et un match de Coppa Italia pour être titulaire pour la première fois. En janvier, son agent peste : « La Juventus continue de le déclarer important mais hier, malgré l’absence de Barzagli, c’est Caceres qui a joué. Ce choix me laisse perplexe parce que le joueur a bien joué en Coppa Italia. Dans tous les cas, j’espère que la société maintiendra sa parole vu qu’elle dit que Rugani est le premier choix après les trois titulaires. Hier, tout le monde du football s’attendait à voir Daniele sur le terrain ». Le message est bien reçu et il peut enfin enchaîner deux matchs de suite.

A la différence d’autres jeunes défenseurs en Europe comme Samuel Umtiti et Raphaël Varane (sensiblement le même âge), Rugani n’a pas le droit d’échouer pour apprendre. C’est le banc que lui réserve Allegri après quelques prestations peu convaincantes, et en particulier un naufrage contre l’Inter, dans une défaite 3-0 en Coppa Italia (qualification aux tirs aux buts).

Désorienté, de moins en moins en confiance, Rugani parvient à se relancer au printemps, profitant des blessures de Giorgio Chiellini et Martin Caceres pour voir son temps de jeu augmenter. Sa bonne fin de saison laisse espérer une explosion pour l’année suivante. Mais durant l’été, la Vieille Dame décide de miser sur Medhi Benatia, reléguant une fois de plus Daniele au fond de la hiérarchie des défenseurs…

Saison 2 : Entre blessures et faible temps de jeu

Il ne débute qu’en septembre et se blesse assez vite. Il ne revient qu’en novembre à temps pour museler un Belotti en état de grâce mais aussi pour participer à la défaite à Doha en Supercoppa. Daniele Rugani ne bénéficie toujours pas de la confiance du mister : il ne joue pas une seule minute dans la phase à élimination directe de Ligue des Champions et n’a pas son mot à dire dans le turnover pratiqué par Allegri en défense. Une blessure vient définitivement pourrir une saison considérée comme un nouvel échec. La direction lui témoigne néanmoins sa confiance avec une prolongation de contrat jusqu’en 2021 actée en décembre 2016.

Saison 3 : Une impression mitigée

Pour sa troisième saison à la Juventus, Daniele Rugani joue beaucoup plus et dépasse pour la première fois la barre des 2 000 minutes. Pourtant, on n’a toujours pas la sensation que sa place dans la hiérarchie ait évolué. Sur le banc dans les gros matchs, Allegri lui préfère toujours Benatia voire Barzagli quand il y a de l’enjeu, et même en Coppa Italia. Quand il est appelé à jouer, le défenseur fait le travail mais ne parvient pas à se mettre en valeur.

Qu’a-t-on appris de Rugani ?

D’abord que ce n’est pas un défenseur qui se montre. Il ne se jettera jamais à la vie à la mort pour dévier un tir en corner. Il ne va pas chercher à laisser la trace de ses crampons sur le joueur le plus charismatique de l’équipe adverse pour envoyer un message. C’est un défenseur extrêmement linéaire, qui excelle dans les duels bien organisés mais semble parfois effrayé par le désordre. Et c’est peut-être cette caractéristique qui aura le plus miné son parcours à Turin. A la Juve, à l’image de Chiellini et même Barzagli, on attend du défenseur qu’il se comporte comme un guerrier valeureux, qu’il sache prendre des risques.

Pour jouer à Turin, les défenseurs doivent aussi savoir jouer de leur instinct quand c’est nécessaire : suivre son flair quand on peut arrêter une action, aider un coéquipier à rattraper une erreur, dépasser le cadre du système tactique quand il faut se sortir d’une situation compliquée, utiliser son physique quand on est opposé à un adversaire. Autant d’éléments que Daniele Rugani a peiné à s’approprier au cours depuis son arrivée à la Juventus.

La linéarité de Rugani est aussi visible dans les phases de possession. On ne le comparera évidemment pas à un Bonucci qui est à un niveau expert de la construction de l’action. Mais Rugani est tout de même un défenseur moderne, doté d’un bon pied droit et qui a appris avec un amant du beau jeu : Maurizio Sarri. Il privilégie avant tout le jeu court mais vers l’avant, il sait contourner le pressing de l’adversaire, notamment avec des passes en première intention. Des qualités qui n’épousent pas le jeu de la Juventus d’Allegri, qui attend de ses défenseurs une circulation de balle patiente et se projette vers l’avant en priorité par les côtés. Ainsi, quand il reçoit le ballon, la posture de Rugani traduit souvent un moment d’indécision quant au choix à accomplir.

Sauvé par le départ de Caldara ?

Toutes ces observations font paraître un avis plutôt négatif sur le joueur. Et il faut admettre que si Caldara était resté, on n’aurait pas vu Rugani avec un autre statut que celui de remplaçant. Bien qu’il ait mûri, il n’a pas assez prouvé pour convaincre Allegri de le lancer dans les grands matchs. Et le fait de s’entraîner avec certains des meilleurs défenseurs du monde n’a pas suffi à apporter la progression attendue. Le staff technique a également  sa part de responsabilité : il a échoué à limer le peu de défauts qu’il avait quand il est revenu à Turin à 21 ans. Globalement, c’est aussi tout le travail d’intégration des jeunes joueurs qui mérite sûrement d’être revu.

Il n’en reste que Rugani n’a pas réussi à se défaire d’une sensation globale d’incertitude ou de timidité. L’arrivée de Caldara, du même âge mais avec des caractéristiques bien plus adaptées au système défensif de la Juventus ne laissait présager rien de bon. Le défenseur de l’Atalanta a un style moins académique, prend plus de risques et sait se salir les mains quand il le faut. Mais n’aura jamais l’occasion de le montrer, la Juventus ayant fait le choix de ne pas miser sur lui. Et Daniele Rugani se retrouve alors avec une dernière chance de faire le saut de qualité tant attendu.

Car le talent de Rugani est incontestable, même s’il se base bien plus sur une intelligence tactique que sur une supériorité physique. C’est ce qui a posé problème à la Juventus. C’est aussi ce qui aurait pu le faire réussir à Chelsea s’il avait rejoint les Blues et retrouver le maestro qui l’a façonné : Maurizio Sarri. Âgé de 24 ans, Rugani a encore une longue carrière devant lui et vit actuellement une expérience qui met plus en avant ses défauts que ses qualités. Mais il est maintenant conscient de ses faiblesses et sait ce qu’il lui reste à faire pour garder sa place à la Juve sur le long terme.

Partiellement basé sur l’article de Davide Rovati : « Cosa sappiamo di Daniele Rugani« 

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