Pellegri, Ozïl, Emre Can… La Juventus a connu plusieurs échecs cet hiver, et n’a pas réussi à séduire de joueurs pour agrandir ses rangs. Quelles sont les causes de tels échecs ? Etait-ce par choix ou par contrainte ? On fait un bilan du mercato hivernal du club, en allant de l’état des finances du club jusqu’aux choix du président et de son directeur sportif concernant les futures recrues.
LES RECRUES PASSEES SOUS NOS YEUX
Pellegri, la jeune pépite italienne
Il a 16 ans (oui oui, 16 ans : né en 2001), et vient de rejoindre Monaco pour la somme de 25 millions d’euros. Pietro Pellegri, attaquant de Genoa, était voué à rejoindre la Juventus, selon plusieurs médias italiens. Pourtant, il n’en a rien été, et le joueur a préféré changer de championnat pour aller dans le club formateur par excellence : l’AS Monaco. Quelle peut être la justification d’un tel choix ? Tout d’abord, la renommée de Monaco, qui l’an dernier a atteint les demi-finales de Ligue des Champions et a fait découvrir au monde Kylian Mbappé, grand espoir du football français. Là-bas, Pellegri peut espérer se faire une place et développer un niveau conséquent, avant de rejoindre un grand club. A 16 ans, il paraissait étonnant de vouloir rejoindre la Juve, même si celle-ci s’intéressait à lui. Cependant, au milieu de joueurs offensifs de renommées mondiales comme Juan Cuadrado, Gonzalo Higuain ou Paulo Dybala, difficile de pouvoir se faire un nom. Le joueur aurait sûrement très peu joué. On peut donc comprendre qu’il ait préféré rejoindre un club spécialisé dans la formation de jeunes joueurs, pour se faire une place et un nom sur la scène internationale.
Özil, le faux espoir allemand
D’après plusieurs médias, l’international allemand évoluant à Arsenal ne paraissait pas près de relancer son contrat avec son club. La Juventus pouvait espérer se lancer sur un coup parfaitement gratuit, comme elle sait si bien le faire. Pourtant, rien ne semble s’être passé entre les deux clubs. Pour faire définitivement taire tout espoir bianconero, l’allemand a même fini par prolonger son contrat avec Arsenal dans les derniers instants du mercato. Difficile cependant de savoir si la Juve a arrêté de lui accorder son intérêt, si Arsenal a décidé qu’il n’était pas à vendre ou si le joueur et son agent ont préféré rester dans le club londonien. Quoiqu’il en soit, ce fut un autre échec pour la Vieille Dame cet hiver.
Can, le cas particulier
Le cas Emre Can est unique en son genre. Annoncé à la Juventus dès le début du mercato pour la somme de 5 millions d’euros, l’allemand est finalement resté à Liverpool. Que s’est-il passé ? On sait que son contrat expire cet été, et qu’il peut d’ores et déjà signer un pré-contrat avec un autre club pour la saison prochaine. Cependant, il n’en est rien. Marotta a même déclaré « Il pourrait le renouveler (son contrat), et, de plus, d’autres équipes lui témoignent leur intérêt ». La Vieille Dame tente probablement de faire venir le joueur gratuitement à la fin de son contrat, et n’a pas jugé nécessaire de le recruter dès cet hiver.
DU CÔTÉ DES FINANCES…
De Laurentiis a récemment déclaré que « la famille Agnelli est l’une des plus puissantes familles italiennes ». Même si ce n’était pas vraiment pour les encenser, on comprend ainsi que la famille dirigeant le club est, d’un point de vue économique, admirée de tous. La Juve est souvent critiquée à cause de son argent. Quand on sait que les Agnelli sont les fondateurs et propriétaires de Fiat et de Ferrari, et propriétaires de la Vieille Dame depuis 1923, on peut comprendre que certains puissent s’en énerver, par peur de ne pouvoir rivaliser. Pourtant, le fair-play financier a toujours été respecté par la Juve et elle n’a jamais été attaquée ou menacée pour avoir enfreint les règles. Le président du club, Andrea Agnelli, a même déclaré être en faveur de ce fair-play : « Initialement, le fair-play financier avait trois objectifs et ils ont tous été remplis : réduire les déficits au sein du secteur, réduire l’implication des entreprises dans le financement des clubs et attirer de nouveaux investisseurs internationaux ». On peut comprendre l’intérêt porté par le président lorsque l’on jette un œil aux profits du club, qui ne cessent d’augmenter d’année en année.
Le graphique ci-dessus, tiré du site ecofoot.fr, nous montre l’évolution des revenus de la Vieille Dame ces dernières années. En 2012/2013, la Juventus a été déficitaire de près de 16 millions d’euros. Seulement quatre ans plus tard, la voilà bénéficiaire de 42,6 millions d’euros : un progrès considérable qui montre les talents d’homme d’affaire du président.
En comparaison avec les autres clubs des quatre grands championnats, c’est la Juve qui a le plus augmenté ses dépenses entre la saison 2015/2016 et la suivante : 21% de dépenses supplémentaires, contre 8% pour le Real Madrid, une diminution de 1% pour le Bayern et de 1% pour Chelsea. Pourtant, au milieu de tous ces clubs, c’est bien la Vieille Dame qui réalise le bénéfice le plus large. C’est ce que nous montre le graphique ci-dessous, provenant de La Gazetta dello Sport.
MAIS ALORS, POURQUOI ?
On voit donc qu’Agnelli, Marotta et Allegri (qui est le quatrième coach italien à avoir le plus dépensé pour un club sur des transferts depuis la saison 1992/1993) n’ont pas pour habitude de lésiner sur les dépenses. Le mercato estival ayant été particulièrement fructueux, les dirigeants de la Vieille Dame ont peut-être préféré s’axer sur d’autres projets financiers, comme la communication (avec l’arrivée de la série Netflix sur le club d’ici peu), ou son stade (qui a développé un partenariat récent avec Allianz). Pendant ce mercato, les ventes et les prêts ont été nombreux de la part de la Juve : on en compte 25. Mais en connaissant le nombre de blessés offensifs, n’était-il pas logique de combler les pertes ?
Un manque de temps certain
Si le club n’a pas pu répondre aux blessures de ses joueurs offensifs, c’est probablement parce qu’il n’avait pas pu anticiper autant de pertes en si peu de temps. Lorsque seul Dybala était blessé, il n’y avait pas besoin d’investir dans un nouveau joueur, puisqu’il restait 5 solutions offensives. Après la blessure de Cuadrado, peu de temps après, la question se posait : faut-il un plan de secours ? Il restait encore 4 options. Cependant, le match contre Atalanta, riche en émotions, a également été riche en blessures : Douglas Costa et Federico Bernardeschi. A partir de là, l’inquiétude a commencé à parcourir les rangs des tifosi : qui pour les remplacer, à un jour de la fermeture du mercato ? Nous avons appris quelques heures plus tard que les blessures des deux derniers n’étaient pas majeures, et qu’elles les empêcheraient de jouer pour un seul match tout au plus. L’imprévu et le manque de temps ont pu prendre Marotta par surprise… ou alors tout était déjà prémédité, pour cette saison comme pour la suivante.
Une question de cohésion
« Mes espoirs et mes ambitions ont toujours les mêmes couleurs » Marchisio.
« La Juve ou rien » Buffon.
« La Juve va vendre Rugani ? Si des clubs le veulent c’est parce qu’il est fort, mais la Juve n’a jamais écouté les offres car ils savent qu’ils ont un diamant » Torchia, agent de Rugani.
Avec toute cette agitation du côté des ventes du club, certains joueurs et leurs agents ont préféré clarifier la situation. Il n’y a eu aucun départ majeur cet hiver, sauf le prêt de Marko Pjaca à Schalke jusqu’à la fin de la saison. Après le mercato estival, la Juventus a mis quelques temps à intégrer ses nouveaux joueurs dans l’équipe. Douglas Costa, Bernardeschi ou encore Matuidi ont tous eu besoin d’un certain temps pour comprendre la mécanique du groupe. Temps qui a coûté un léger retard au club turinois, qui ne parvient pas à rattraper le SSC Napoli, toujours en tête du championnat. Il est possible qu’Allegri ait préféré favoriser la cohésion de groupe jusqu’à la fin de la saison, car l’équipe a enfin trouvé un véritable mode de fonctionnement. On rappelle que sur les 14 derniers matchs, la Vieille Dame ne compte aucune défaite.
Marotta prépare déjà la saison prochaine
La Juve a vendu de nombreux joueurs cet été, et continue de faire du profit avec sa stratégie marketing et ses nouveaux partenariats. Mais où va donc cet argent ? Il est probable que Marotta et Agnelli le gardent bien précieusement jusqu’à cet été, où il sera possible de frapper un grand coup. Le club étant encore en course dans toutes les compétitions et rarement dans une position délicate, le directeur sportif a préféré garder l’argent récolté par les ventes et les différentes sources de revenus pour cet été, et investir alors dans de nouveaux joueurs. On connaît l’intérêt de la Vieille Dame pour Carrasco, Emre Can (qui pourrait venir gratuitement), et des joueurs pouvant combler les postes un peu plus fragiles. Alex Sandro paraissant sur le départ (bien qu’on n’en soit absolument pas certain), Asamoah et Lichsteiner ayant de moins bonnes performances, il est possible de voir le club investir sur quelques défenseurs, malgré le retour de Spinazzola (défenseur gauche) et Caldara (défenseur central) cet été.
La Juventus a donc réalisé un mercato vierge, n’ayant recruté personne, et ayant préféré vendre ou prêter ses joueurs. Cependant, pas de quoi affoler les tifosi : tout va bien dans le club, qui ne manque de rien. Il est probable que le directeur sportif et le président du club aient préférer attendre l’été pour réaliser un mercato fructueux, comme le précédent ! On attend avec impatience de voir les premiers noms des futurs bianconeri.