Stile Juve a interviewé en exclusivité pour vous, une des voix les plus connues du football italien en France. Le commentateur de Bein Sport : Philippe Genin.
Plusieurs thèmes ont été abordés pendant l’interview :
La Série A
La Juventus
Les joueurs de la Juve
La Ligue des Champions
Le futur du club bianconero
Questions personnelles
La Série A
Que pensez-vous du championnat cette saison par rapport aux dernières saisons ?
« Il est sur sa continuité depuis 3 ans, c’est un championnat qui est en train de revenir dans les clous, on le voit avec le nombre de buts marqués par journée. Il y a quand même une belle évolution, des clubs qui ont su recruter intelligemment, aussi grâce à ce qu’il s’est passé avec la Juve : aller chercher des joueurs d’expérience, mais aussi de jeunes joueurs. »
Pour vous la Série A est-elle redevenue le très grand championnat qu’elle était il y a 10-15 ans ?
« Pas encore, elle est sur le retour. La roue tourne, tout le monde a connu ses moments de disette : que ce soit l’Angleterre, l’Allemagne, l’Espagne… Maintenant c’est au tour de l’Italie. On le voit les choses s’essoufflent au bout d’un moment dans certains pays : les générations commencent à changer. L’Italie a commencé sa révolution, tout n’est pas encore parfait que ce soit dans les finances ou dans les stades mais il y a un signe qui ne trompe pas : le public est de retour et en augmentation, ce qui prouve que ça repart dans le bon sens. »
Que pensez-vous de la VAR ?
La vidéo reste le grand débat à l’heure actuelle. Il y a eu des contestations dès la première journée entre la Juve et Cagliari sur le premier penalty de la VAR détourné par Buffon. Même avec la vidéo, il y avait déjà une erreur : pas de penalty car il y avait position de hors-jeu au départ de l’action. Au fil du temps les choses se sont mises en place intelligemment, il a fallu que tout le monde se mette à la page au niveau du fonctionnement et de l’utilisation. Au début on l’a beaucoup trop utilisé dans tout et n’importe quoi, avec parfois jusqu’à 5 minutes avant de prendre la décision. La vidéo c’est bien mais in fine c’est l’homme qui prend la décision. On a vu des moments où son utilisation a été décisive : la VAR qui intervient sur un but du Napoli pour savoir s’il y avait hors-jeu ou pas, il avait été refusé au départ puis finalement accordé, on a vu des penaltys sifflés logiquement, des buts refusés logiquement. Tout se met en place petit à petit. »
Est-ce que faire intervenir la vidéo dénature le jeu ?
« Cela pose toujours débat. Il y a des situations comme le hors-jeu où il faudra déjà revoir la règle du hors-jeu en elle-même, c’est fondamental. Mais la vidéo a quand même corrigé des situations qui pouvaient être qualifiées d’injustes. En live, quand on commente on est comme tout le monde, comme l’arbitre, comme les spectateurs dans le stade : on voit les choses et d’un seul coup il y a la vidéo qui arrive. Nous on a notre analyse, on la donne dans le temps réel. Avec la VAR on arrive 3 minutes plus tard à dire on revient sur l’action. Par exemple sur un match de la Roma, il y avait eu une faute à l’entrée de la surface pour la Roma et derrière il y a eu but, il y a une main dans la surface de Manolas alors qu’il y avait déjà faute avant : le choix reste ambigüe, à la fin c’est l’homme qui décide. »
Pour ou contre la vidéo dans les grandes compétitions type Ligue des Champions ?
« On va y venir car on y aura déjà droit pendant la Coupe du Monde. Ce qui reste dérangeant c’est qu’elle n’a pas été utilisée sur les matchs de préparation qu’il y a eu ces dernières semaines. Ça veut dire que les arbitres n’y auront pas été formés, à part les arbitres italiens, les allemands même s’ils sont moins au point que l’Italie sur les décisions. C’est gênant dans la formation des arbitres car il faut que ça soit utile pour eux aussi : s’ils ne sont pas formés quelques mois avant mais seulement au dernier moment, il risque d’y avoir de grandes aventures pendant la Coupe du Monde. »
La Juventus
Qu’est-ce qui vous plaît dans la Juve 2017-2018 ? Points forts / points faibles
« Le point fort de ce club, qui est une institution, d’ailleurs Blaise Matuidi l’a découvert en arrivant et il n’arrête pas de le rappeler, c’est que c’est un club programmé pour gagner. Qui a peut-être ses défauts parce qu’il y a certains joueurs qui commencent à être sur le déclin par rapport à l’âge, mais cette expérience-là, on ne peut pas s’en passer. On l’a vu à des moments importants de cette saison. Maintenant, il y a encore cette petite marche à franchir pour aller chercher notamment la Ligue des Champions. »
Depuis 2 ans, la Juventus semble avoir beaucoup plus de difficultés à remporter le Scudetto. Le problème vient-il du recrutement ou de ses principaux rivaux ?
« Ça vient du redressement de la Série A et c’est bon signe. Un championnat où il n’y a qu’une ou deux équipes au niveau ce n’est pas une bonne chose. Aujourd’hui, on a ce mano a mano entre la Juve et le Napoli qui est très intéressant. Derrière on a encore la Roma, la Lazio, l’Inter, le Milan qui a fait un mauvais départ mais qui est quand même là, la Fiorentina qui a eu aussi beaucoup de changements mais qui remonte, l’Atalanta qui a pris un mauvais départ mais qui arrive à confirmer sur la fin… ça prouve que tous ces clubs-là prennent de l’expérience aussi. Il y a eu un gros trou pendant 4-5 saisons maintenant il faut le combler. Mais aujourd’hui la Juve n’est pas moins forte qu’il y a 4 ans, au contraire. Par contre la concurrence s’est armée derrière. »
En parlant de recrutement, la Juve est réputée pour recruter majoritairement des joueurs pas chers ou en fin de contrat. La réussite du club passe-t-elle par l’acquisition de ce type de joueurs ou par l’achat de top players à chaque mercato ?
« Ils arrivent à acheter des joueurs en mettant des sous mais économiquement ils ont une ligne de conduite qui est très intelligente : ils vont pister de très bons joueurs, qu’ils soient très aguerris ou des joueurs qui ont un potentiel avant de venir à développer. Derrière ils ont un temps d’avance sur tout le monde. Il y a plus d’une vingtaine de jeunes joueurs prêtés mais sous contrat avec la Juve pour qu’ils s’aguerrissent en Série A, B ou dans des divisions inférieures. C’est une excellente façon de fonctionner, certains clubs commencent d’ailleurs à s’exprimer de la même manière en recrutant dès le mercato d’hiver et en laissant les joueurs à disposition dans les clubs pendant 1, 2 ou 3 saisons supplémentaires. Ce sont des paris à chaque fois car on est jamais à l’abri d’une blessure ou de s’être trompé mais sur le lot la Juve est plutôt en force. Dans sa façon de fonctionner, la Juventus est vraiment un modèle. »
Les joueurs de la Juve
Que pensez-vous du cas Marchisio ?
« C’est quelqu’un que j’aime beaucoup. Il fait partie de l’histoire, il appartient à la Juve. D’un point de vue personnel, il a eu des pépins physiques de son côté. Maintenant lui, sur sa fin de carrière, et la Juve ; sont un peu à la croisée des chemins, est-ce qu’il y a l’entente réelle ou pas avec l’entraîneur ? Beaucoup de choses peuvent être mises en cause. Personnellement je le garderai jusqu’au bout : c’est toujours bien d’avoir un joueur qui a l’âme et l’histoire du club. Après si c’est pour qu’il souffre et que ça se passe mal, il vaut mieux qu’il aille prendre l’air ailleurs et revienne peut être à la façon d’un Pirlo plus tard en intégrant quelque chose au sein du club. »
Voyez-vous en Dybala un joueur qui pourrait s’épanouir dans la durée avec la Juve ?
« J’espère du fond du coeur parce que c’est un jeune joueur avec un potentiel énorme, à qui on a demandé beaucoup sur cette saison, avec ce fameux numéro 10 qu’il a accepté d’endosser. Il avait refusé jusque-là car ça représente tellement de choses pour ce club, c’est quelque chose de compliqué. On est dans une époque qui est assez folle au niveau des tarifs de transferts. L’intelligence de la Juve c’est qu’ils ne retiendront jamais un joueur contre sa volonté. Si le joueur ne manifeste pas l’envie de partir, il s’exprimera dans la durée avec les bianconeri. Maintenant, s’il est attiré via son entourage, ses agents, etc, sur d’autres clubs alors il faudra le laisser partir mais ça serait malheureux car ce serait bien qu’on arrive en 2018 à garder des joueurs, surtout des jeunes. J’espère d’ailleurs qu’on va arrêter ce fameux mercato d’hiver, qu’on va arrêter tous ces transferts où un joueur peut signer deux fois dans l’année dans n’importe quel club, pour redonner un peu cette valeur du maillot parce que c’est ce qu’on a perdu dans le football aujourd’hui. Il faudrait qu’on retrouve cette stabilité : si un joueur signe pour 5 ans dans un club, il a un contrat à respecter et au minimum il devra y rester 2 ans, si le joueur sait qu’au mercato d’hiver il ne peut pas partir, il va mouiller le maillot. Il y a encore quelques années, rien qu’en Série A, il y avait des cadres dans tous les clubs. Maintenant, le fait de pouvoir être sur le départ tous les ans, au moindre désaccord, ça rend tout compliqué. »
Higuain est un très bon joueur qui semble pourtant parfois absent des grands rendez-vous. Que lui manque-t-il pour faire la différence ? Peut-il devenir un leader ?
« C’est déjà un leader avec ce qu’il a apporté en 2 saisons. Après il a eu des soucis personnels dans sa vie, tout le monde peut être affecté par rapport à cela. Parfois on attend trop des gens surtout des footballeurs alors que ce sont des hommes comme les autres. Tout le monde a ses problèmes, on peut être performant à un moment, moins à un autre, c’est comme ça. Quand ils sont au top, avec Dybala, c’est quelque chose d’exceptionnel, on se régale. On voit cette entente entre les deux c’est fabuleux. Ce qu’il lui manque, à l’âge où il est, c’est d’aller chercher la Ligue des Champions et aussi des bonnes performances avec l’Argentine. Mais sur ce point c’est encore un autre débat. Pour beaucoup il ne faut pas toucher à Messi, alors certes c’est un joueur exceptionnel mais quand il refuse l’arrivée de certains joueurs parce que ça pourrait lui faire de l’ombre, c’est dommage. Aller dire que Dybala aurait eu un problème de comportement… Messi il faut qu’il accepte qu’il y ait des joueurs derrière lui, qui puissent prendre la relève comme Higuain ou Dybala. Surtout que Messi en équipe nationale n’a rien prouvé contrairement à Maradona, rien. »
La défense de la Juve est capable du meilleur comme du pire cette saison. Que lui manque-t-il pour trouver une stabilité ?
« Il faut qu’elle retrouve ses cadres. Le départ de Bonucci a fait mal, il fallait peut être pour lui un départ parce que ça se passait moins bien avec son entraîneur, il s’est passé des petites choses sur la dernière finale de Ligue des Champions… Après on est pas à l’intérieur des groupes non plus pour savoir les choses à 100%. Maintenant, le départ de ce joueur à quand même cassé quelque chose. Ça n’enlève rien à des joueurs comme Barzagli, qui fait partie des cadres sur lesquels s’appuyer, mais si on voit sur le dernier match contre le Real, l’interrogation est toujours là : pourquoi pas Rugani ? On parle tout le temps de lui comme le futur, aussi de la Nazionale, après il faut savoir reconstruire au bout d’un moment. Mehdi Benatia lui, a fait son travail, on ne l’attendait peut-être pas trop à ce moment-là, mais il a répondu présent. Ça prouve que c’est un gros compétiteur. Chiellini pour moi est intouchable. Buffon reste intouchable parce que c’est un géant, mais il faut aussi savoir passer la main au bout d’un moment. Il y a eu tellement de regrets entre ne pas gagner la Champions et ce qui s’est passé par rapport à la Coupe du Monde avec la Nazionale. Il faut que la Juve, qui est très forte pour cela, réussisse à reconstruire cette défense maintenant. »
La Ligue des Champions
Quelle analyse faites-vous du match aller de la Juve contre le Real Madrid ? Voyez-vous les bianconeri se qualifier au match retour ?
« J’aimerai bien mais ça va être compliqué. Il y a déjà un but de trop, rien à dire sur la supériorité du Real. Après on peut revenir un peu sur l’arbitrage. Le Paris Saint Germain l’a subi, on l’a vu aussi entre la Roma et Barcelone, il y a des choses qui ne sont pas sifflées. Après on ne peut pas se cacher que derrière l’arbitrage sur ce match aller. J’ai du mal à critiquer Allegri parce que c’est un coach qui a quand même prouvé beaucoup de choses dans sa carrière, par contre sur le choix tactique et sur le choix des joueurs, j’ai été très surpris par la composition. Ça a peut-être coûté le match aller. Sur une éventuelle qualification ? Dans le sport il n’y a jamais de certitudes. S’ils se qualifient, ce serait incroyable. Normalement ils devraient montrer un autre visage. Un visage de révolte. S’ils sont révoltés et que c’est positif mais que ça ne suffit pas, ça risque de laisser des regrets. Mais aujourd’hui il y a quand même un grand fossé, il n’y a pas à rougir de se faire sortir par le Real. Ils ont aussi sorti le PSG avec ses stars, c’est comme ça, ça fait partie de cette Ligue des Champions qui est très compliquée, la compétition la plus dure. »
Que manque-t-il à la Juve pour gagner la Ligue des Champions ?
« Continuer à emmagasiner de l’expérience. Il y a des clubs comme City ou le PSG qui investissent beaucoup d’argent et qui n’ont pas gagné, qui échouent en huitièmes, en quarts, qui n’arrivent pas à passer ce cap. La Juve a de l’expérience dans cette compétition car il y a déjà eu 2 finales en 4 ans, ce qui est déjà exceptionnel, il faut continuer à grandir. Il y a ces fameux petits détails, l’arbitrage, le choix d’un joueur, l’absence d’un joueur aussi. Si on prend le match aller face au Real, l’absence de Pjanic est énorme, et on l’a vu sur des ballons dans l’entre jeu et sur cette façon de permettre au Real d’avancer vers le but de Buffon. C’était prévisible et c’est pour ça qu’on peut aussi discuter de certains choix tactiques mais on n’est pas au sein du groupe à 100% pour pouvoir juger et savoir ce qu’il se passe. Ce qui manque pour la Juve, c’est peut être ces joueurs qui vont marquer dans les moments les plus importants. On a vu que sur le 1-0 il y a eu des situations pour les hommes d’Allegri, mais ils n’ont pas réussi à marquer. C’est un match sec pour eux et c’est étonnant. Est-ce que c’est la pression, est-ce qu’il y a cette personne qui va sublimer le groupe ? C’est le futur qui le montrera. »
L’écart avec les autres top clubs européens (Barça, Real, Bayern, etc) est-il une question d’argent, d’état d’esprit ou du manque de compétitivité en Série A ?
« Le problème aujourd’hui, c’est qu’il y a des modèles économiques mais la gestion n’est pas la même pour tout le monde. Il faudrait expliquer comment fonctionne le fairplay financier pour le Real, pour Barcelone… Il est arrivé que le roi passe derrière le Real pour éponger des dettes, ou bien pour Barcelone, il y a un compte pour acheter et un pour encaisser… Il y a beaucoup de choses qui, économiquement, ne sont pas pareilles pour tout le monde. Maintenant, la Juve gagne de l’argent de saison en saison, d’ailleurs elle n’est pas loin du Bayern, il n’y a pas de quoi rougir. Aujourd’hui il y a deux clubs : le Real et le Barça. Ce qu’il faut déjà c’est toujours rester au même niveau, pour continuer à engranger de l’argent, essayer de stabiliser les choses. Le club est très bien géré. »
L’année prochaine la Ligue des Champions change de format. Pensez-vous que cela permettra aux équipes de Série A de se mettre en valeur ?
« Quand on est absent longtemps de cette compétition c’est compliqué. On l’a vu avec la Juve : descente en Série B, absence de la Ligue des Champions, il a fallu repasser par l’Europa League… Il faut redécouvrir la compétition, ce qu’a réussi la Roma cette année, en ayant pris des revers importants sur les saisons écoulées. Pareil lorsque le Milan retrouvera la Ligue des Champions après autant d’absence, ce sera compliqué. Se retrouver avec 4 clubs en Champions ça peut peut-être ouvrir des portes pour recruter, pour les sponsors, pour beaucoup d’aspects, c’est une bonne carte. »
Le futur du club bianconero
La Juve est-elle en fin de cycle ?
« Il va y avoir l’arrêt de Buffon, mais il ne faudra pas que ce soit vu comme un vide abyssal où on ne peut rien faire derrière. C’est d’ailleurs bien préparé cette année avec l’arrivée de Szczesny. Il a fait plutôt des bons matchs à chaque fois qu’il a remplacé Buffon. Est-ce qu’on va être aussi sur une fin de cycle avec le départ de Dybala, qui est pourtant un jeune joueur ? S’il y a l’appel des sirènes ailleurs et qu’il veut partir, il faudra reconstruire. Quand on voit ce qu’essaie de faire le club dans le recrutement, les joueurs ciblés, ils préparent les choses depuis un an déjà. On parle d’Emre Can, Milinkovic est suivi depuis un moment, maintenant est-ce qu’ils réussiront à l’avoir vis à vis de Lazio ? C’est difficile à dire. Ce serait le plus beau coup qu’ils pourraient faire pour continuer dans la durée sur ce qui a déjà été fait, ce serait exceptionnel et je rêverai de voir ce joueur du côté de la Juve. »
Le départ d’Allegri est-il nécessaire pour que la Juve puisse entrer dans un nouveau cycle ou au contraire doit-il rester encore quelques années ?
« La Juve est dans la construction aujourd’hui. La seule chose qui pourrait faire partir Allegri ce serait un échec sur le titre réel. Comme il le dit tout le temps, il est en contrat jusqu’en 2020, il peut s’inscrire dans la durée. S’il y a une grosse proposition, elle viendra de l’étranger : France, Espagne, Angleterre… Ce qui donnera une indication ce sera le premier entraîneur qui partira officiellement et qui signera ailleurs. Voir Allegri partir c’est une chose, mais qui pour le remplacer ? Zidane n’a pas de raisons de partir du Real aujourd’hui, Simone Inzaghi est aussi pressenti du côté de Naples si Sarri s’en va. On peut penser à un retour de Didier Deschamps. S’il y a un choix de sa part de quitter l’équipe de France, ça me ferait très plaisir de voir Deschamps revenir dans le cas où Allegri partirait. Il a accepté de prendre les rênes en Série B, c’était compliqué mais il a rendu les clefs propres 1 mois avant la fin de la saison. Deschamps ça reste une image plutôt positive et importante pour le club. Maintenant, Allegri s’est inscrit dans la durée d’Antonio Conte en amenant sa façon de faire. Il a gagné les titres qu’il fallait, il a emmené le club 2 fois en finale de Ligue des Champions, il ne la gagne pas… Il y a un échec cette année, c’est comme ça. Si c’est changer pour changer il n’y en a pas l’intérêt. »
On sait que la Nazionale est en chantier. Des joueurs comme Rugani ont du mal à s’imposer dans leur club. Y a-t-il un manque de considération pour les jeunes italiens ?
« Le problème c’est qu’aujourd’hui c’ est un peu partout pareil. Même en France, il y a peut-être une belle équipe mais beaucoup jouent à l’étranger, plus que dans le championnat de France. C’est pareil un peu pour toutes les nations, c’est très compliqué, à part l’Espagne où ils sont très ancrés chez eux… Il y a peu de places aux joueurs italiens : la Nazionale en pâti forcément. Rugani a peu de temps de jeu, donc retrouver le niveau sans être présent en championnat et les compétitions au-dessus, c’est encore plus compliqué, surtout pour être au top en équipe nationale. Il faut une réforme, qui devrait arriver, où tout le monde devra repenser à ces joueurs. »
Pensez-vous que le futur de la Juve passera par des jeunes italiens comme Caldara, Spinazzola ?
« Ces joueurs là on les connaît dans un système, dans un club où tout roule bien… On les a vu en Europa League où ça se passait bien… Maintenant il faut les voir dans cette équipe de la Juve, avec le championnat, les titres à conserver, plus derrière la Ligue des Champions… C’est là qu’on va voir s’il y a ces qualités qu’on voit pour l’instant, mais qu’on espère plus fortes… »
Selon vous, les joueurs suivants seront-ils encore présents la saison prochaine ?
Marchisio : « Je l’espère. »
Lichtsteiner : « On l’annonce à chaque fois partant, il est toujours là. Pour moi ça fait partie des cadres de cette équipe. Ce joueur ne m’a jamais déçu. Même si ça se passe mal il fait toujours ses matchs. Il ne lâche rien. J’aimerais qu’il reste. »
Asamoah : « Il est en fin de contrat, apparemment il y aurait entente avec l’Inter. Si c’est un départ il ne me gênera pas. »
Khedira : « C’est toujours un point d’interrogation sur ce joueur. Suivant qui arrive au milieu de terrain, il doit partir. »
Sturaro : « C’est un bon grognard. Si Allegri reste, il sera là parce qu’à chaque fois qu’on fait appel à ces joueurs-là, ils ne déçoivent pas. Ils savent qu’ils ne sont pas des titulaires mais quand on fait appel à eux ou en cours de match ou en tant que titulaire, ils sont là. Moi je le garderais. »
Mandzukic : « Je pense qu’il va partir. C’est peut-être la fin d’une histoire avec la Juve. »
Buffon : « Il a toujours ce record de nombre de matchs en Série A à aller chercher. Après est ce qu’il faut risquer de peut-être faire la saison de trop ? ça me fera mal au cœur en tout cas : comme l’arrêt de Totti ou d’Inzaghi. A chaque fois c’est un pan d’une génération qui s’en va, c’est plein d’histoires. Mais il faut que celle de Buffon avec la Juve se termine bien. Pour cela dans tous les cas, il doit rester au club par la suite, c’est important. »
Questions personnelles
Quel est votre joueur préféré de tous les temps ? Et à la Juve ?
« Mon joueur préféré ça reste Filippo Inzaghi. Pour plein de choses, mon chouchou c’était lui. A la Juve, il est récent de par son histoire, mais c’est un joueur qui a un tel talent, une telle aura, il a dégagé tellement de choses : c’est Pirlo. »
Vous avez à disposition tous les joueurs de Serie A. A quoi ressemble votre 11 type ?
Insigne – Higuain – Dybala
Hamsik – Pjanic – Nainggolan
D’Ambrosio – Chiellini – Bonucci – Florenzi
Buffon
Quel est votre meilleur souvenir footballistique que vous ayez commenté ?
« Il y en a beaucoup. Déjà en 98 j’ai eu l’honneur de commenter l’équipe de France face à la Croatie, avec les deux buts de Thuram. Ça reste un souvenir important : c’est l’équipe de France, ma première Coupe du Monde… Après, en Ligue des Champions, j’ai la double confrontation des deux clubs de Milan, avec la qualification de l’AC Milan. Ça a été un moment très fort : des jets de pétards, le maillot de Dida qui avait brûlé, c’était une ambiance très particulière qui n’a rien à voir avec le championnat. Enfin, une rencontre avec Nedved qui avait été ballon d’or, la même chose avec Shevchenko. C’est des moments particuliers comme ça, qui n’arrivent pas tout le temps. »
Qu’est-ce qu’on fait en juin 2018 quand on est italien et qu’on a ni la Squadra Azzurra, ni la Série A avec Pippo et Greg à la tv ?
« Comme on est passionné de football on regarde quand même la Coupe du Monde et on se dit que forcément c’est dommage que cette équipe d’Italie ne soit pas là. En tant que commentateur j’en suis affecté aussi parce que je n’aurai pas à les commenter en Russie pour ma 5ème Coupe du Monde. Mais on regarde le foot parce qu’on l’aime. Puis on regarde ce qui se profile au loin du côté de la Série A et on se donne rendez-vous sur Bein Sport pour la rentrée fin août. »
Merci encore à Philippe Genin de s’être prêté au jeu et d’avoir répondu sans détours et en toute franchise à nos questions !
Vous pouvez le retrouver sur son compte Twitter : @PhilippeGenin !